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Récit

Découvrez le pouvoir de votre nez

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Unsplash

La première édition du Green Food Festival a vu le jour dans le cadre de l’Année de la Gastronomie au cœur du Parc Phœnix de Nice, ce lundi 28 février.

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Tout commence par une expérience. Des petits bonbons orange sont distribués au public de la conférence, qui sont invités à les sentir avant de les goûter. Des notes légèrement fleuries et sucrées chatouillent les narines : le stimulus sécrète la salive et les participants ont l’eau à la bouche.

Deuxième étape : pincer le nez, et mettre le bonbon en bouche. On ressent l’acidité, les textures. Mais il faut respirer à nouveau par le nez pour que les arômes d’agrumes fassent leur apparition : « le rôle de la langue est de vous dire que c’est acide, mais c’est votre nez qui vous indique que c’est de l’orange », explique Diane Saurat, conférencière qui travaille notamment pour le Musée International de la Parfumerie et la Maison Fragonard.

On doit prendre le temps de sentir ce qu’on va cuisiner

Notre nez joue donc un rôle primordial dans notre façon de goûter les aliments. Et pour cause : d’après les dernières études menées, nous serions capables d’identifier, mémoriser et reconnaître 10 000 odeurs. Mais encore faut-il travailler ce sens !

« La cuisine est le meilleur lieu d’expérimentation pour le nez. On doit prendre le temps de sentir ce qu’on va cuisiner, d’où l’importance de respecter la saisonnalité des aliments. Une tomate en février ne sent rien. Une tomate en juillet est gorgée de soleil et a des parfums à exprimer », ajoute Diane Saurat, qui précise que les personnes victimes d’anosmie ou d’agueusie (donc de perte de l’odorat et/ou du goût), notamment en raison de la pandémie de Covid-19, pourraient s’exercer et rééduquer leur nez.

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Quand on est petit, on n’a aucun a priori sur les aliments

Le pouvoir de la mémoire olfactive

Un nez qui travaillerait d’ailleurs bien avant notre naissance. C’est au cours de la 12e semaine de grossesse que le fœtus commence à enregistrer des odeurs, grâce au liquide amniotique et, de fait, à la nourriture ingérée par la mère. Des premières stimulations qui détermineraient les goûts du futur enfant. L’olfactif arrive donc avant le gustatif.

Mais attention, ces premiers mois de vie ne limitent pas nos goûts. L’éducation joue également son rôle par la suite : « quand on est petit, on n’a aucun a priori sur les aliments. Plus on fait découvrir les aliments aux enfants quand ils sont jeunes, plus on a de chances qu’ils aiment un maximum de choses », nous précise Diane Saurat.

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Diane Saurat – © GFF

Les différents régimes alimentaires, en fonction des cultures du monde, pourraient également influencer notre propre odeur corporelle et donc nos appétences en termes de parfum : « Les Italiens, qui ont un régime alimentaire particulièrement marqué en produits lactés, préfèrent généralement les parfums à base d’agrumes. Les Espagnols, qui consomment beaucoup d’huile d’olive, d’ail et d’épices, apprécient plutôt les parfums plus capiteux et orientaux. En Asie du Sud-Est, on retrouve une nourriture à base de bouillon et de poisson cru et, généralement, les habitants préfèrent les parfums doux et délicats. »

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Le parent pauvre des sens

Cette mémoire olfactive, décrite par Proust et sa madeleine dans À la recherche du temps perdu, jouerait un rôle particulièrement important dans les dix premières années de notre vie, avant que les autres sens (en particulier la vue), ne prennent le dessus. Stimuler cette mémoire serait donc un moyen efficace de lutter contre certaines maladies neurodégénératives, comme Alzheimer.

Nous, humains, sommes avant tout des animaux

Et pourtant, malgré ce pouvoir et malgré les 250 000 molécules odorantes de la planète, 70% de notre perception du monde passerait par notre vue aujourd’hui.

Mais selon Diane Saurat, l’odorat « est un sens auquel on prête peu attention, probablement parce que c’est celui qui nous rattache le plus à notre animalité, et nous avons beaucoup de mal avec cette approche. De comprendre que nous, humains, sommes avant tout des animaux. »

L’autre problème, selon la conférencière, est le manque de recherche autour de ce sens : « L’olfaction est un parent pauvre : quand vous êtes petits, on vérifie tout sauf ça. On regarde si vous voyez bien, si vous entendez bien, on teste vos réflexes, on organise une semaine du goût… Mais l’olfaction n’est jamais testée, c’est dramatique. Il ne faut pas oublier que votre nez est votre ami. »