L’affaire est suivie de près par l’hôtellerie monégasque. Une jeune femme a été traduite devant le tribunal correctionnel pour avoir sous-loué son appartement appartenant au secteur protégé.
A Monaco, les responsables hôteliers s’agacent de plus en plus de la concurrence des plateformes collaboratives, à commencer par celle d’Airbnb qui explose tous les chiffres du secteur touristique. L’hôtellerie de la principauté aurait ainsi subi une perte de chiffre d’affaires de l’ordre de 10 à 15% depuis 2015.
Dans ce contexte tendu, la question de la sous-location de logements domaniaux par leurs locataires a même été posé par les professionnels qui soupçonnent des fraudes massives. Non sans raison, car cette question vient précisément de refaire surface. Pour la première fois en effet, une telle pratique a été évoquée à l’audience du tribunal correctionnel.
Une annonce sur le site d’Airbnb
Sur le banc des accusés, une Monégasque sans emploi de 25 ans, est soupçonnée d’avoir sous-loué son appartement des Jacarandas. Or, l’immeuble situé allée Guillaume-Apollinaire appartient aux « Domaines ». Il s’agit donc d’un logement à loyer modéré (environ 600 euros par mois dans ce cas) et donc interdit à la sous-location comme il l’est notifié dans le bail. Cela n’a pas empêché la jeune femme de mettre une annonce, courant mai, sur le site… d’Airbnb. Et ce, juste avant le Grand Prix de Monaco de Formule 1 qui attire une foule importante en principauté.
C’est justement pour assister à la célèbre course automobile que deux Français ont loué son logement sur la plateforme de location saisonnière. Or, le 26 mai, la veille du départ, l’un des deux hébergés a fait un malaise. Les secours sont intervenus et ont transporté le malade au Centre hospitalier Princesse-Grâce. Jusque-là rien que de très normal. Mais lors des vérifications d’usage, notamment concernant le lieu d’hébergement des deux amis, les policiers, remontant jusqu’à la jeune femme monégasque, ont découvert le pot-aux-roses. Cette dernière avait bien mis son logement en location pour 70 euros par jours, soit, en l’occurrence, 1400 euros pour les deux jours que durent le Grand Prix de F1.
Elle reconnait les faits
Lors de son procès, la prévenue a reconnu les faits. Mais elle a évoqué des difficultés financières et une « tolérance » concernant ces pratiques car, selon elle, « de nombreux Monégasques font la même chose ». Nous y voilà… Appelée à témoigner, la représentante des Domaines a ainsi admis connaître plusieurs cas de sous-location. Quand bien même les plateformes communautaires prennent soin d’expliquer sur leurs sites toutes les règles que le loueur doit respecter.
« N’est-ce pas bizarre que vous déboursiez pour votre habitation moins de 600€ pour un mois et de l’autre côté vous encaissiez 1 400 € pour deux jours ? », s’est étonné le président du tribunal, Jérôme Fougeras-Lavergnolle. Vous auriez dû vous douter d’une interdiction certaine. D’autant plus que la clause de sous-location est bien mentionnée dans le contrat de bail que vous avez signé ! »
Décision le 22 janvier
« Cette personne se fait de l’argent sur le dos de l’État qui met à disposition des nationaux des appartements à des prix défiant toute concurrence, a renchéri le premier substitut Cyrielle Colle. Si Madame n’avait pas les moyens de se maintenir dans les lieux, elle aurait dû demander un échange avec un loyer plus bas. De plus, les aides financières ne manquent pas. Je requiers quatre mois d’emprisonnement assortis du sursis. »
L’avocat de la défense, de son côté, fait remarquer que rien dans le Code civil ne réprime la sous-location. Il réclame la relaxe. L’État monégasque, partie civile à l’audience, demande un euro symbolique. L’affaire a été mise en délibéré. Le tribunal rendra sa décision le 22 janvier. En attendant, l’Hôtellerie monégasque rêve d’un jugement qu’elle souhaite exemplaire – et, donc, espère-t-elle, dissuasif.