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Récit

Soupçonné d’avoir violenté sa femme enceinte, il comparaît devant le Tribunal de Monaco

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© Pixabay

C’est un couple au mode de vie très particulier qui s’est présenté à la barre, mardi 14 mars dernier.

Il est cadre de banque de nationalité française, son épouse, elle, est russe et employée dans une boutique. À 44 ans, c’est le ventre bien arrondi qu’elle se présente devant les magistrats, après avoir déposé une plainte contre son mari de 15 ans son ainé, pour coups et blessures. Des faits que ce dernier va nier en bloc, tout au long de l’audience correctionnelle.

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De la musique un peu trop forte

Le 25 janvier dernier, à la mi-journée, une violente dispute éclate entre les deux protagonistes à l’intérieur du studio dans lequel ils cohabitent à Monaco. Alors que monsieur s’apprête à faire une sieste, il s’agace de la musique qui émane du téléphone de madame. Il se lève, saisit un parapluie, et tape violemment sur le smartphone, encore dans les mains de sa femme.

Si jusque-là, les deux versions coïncident, cela ne va pas durer très longtemps. Entendu en garde à vue, l’homme va soutenir que la dispute a pris fin juste après cet incident, alors que la femme va jurer avoir reçu plusieurs coups de parapluie. Pour preuve : des marques rouges au visage et sur le haut du corps que le CHPG a constatées, après que la victime s’est rendue à l’Aide aux Victimes d’Infractions Pénales (AVIP).

D’où viennent ces marques ?

Mais alors, d’où viennent ces rougeurs ? Le prévenu n’en sait rien. D’ailleurs, il ne savait pas non plus pour la grossesse de sa femme. « Comment pouviez-vous ignorer la grossesse de votre épouse ? Ça se voit sur les photos », s’étonne le Président. « Hormis un texto m’indiquant le fait qu’elle allait être maman, elle ne m’a jamais rien dit franchement, et nous n’avons plus de vie de couple, depuis longtemps. Disons que nous avons vécu deux années heureuses après notre mariage, puis les dix années qui ont suivi depuis sont catastrophiques. Malgré cela, je n’ai jamais tapé ma femme », rétorque le prévenu.

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« S’en prendre au téléphone dans la main de quelqu’un n’est-ce pas déjà un acte de violence ? », poursuit le Tribunal sans obtenir de réponse convaincante : « Non, car mon état d’esprit n’était pas violent ». Perplexe, l’un des assesseurs s’interroge sur la raison du maintien de ce mode de vie si particulier. « Ses parents vivent en Russie, elle n’a pas de famille ici et je ne veux pas lui causer du tort », répond alors l’interrogé.

« J’ai fait appel à un donneur »

Lorsque le juge s’adresse à la future maman pour lui demander si elle souhaite réclamer des dommages et intérêts, cette dernière fond en larmes. Son français n’étant pas parfait, elle semble déboussolée : « Ce jour-là, il est devenu fou. J’ai eu peur pour le bébé. J’ai 44 ans, c’est ma dernière chance de donner la vie. Il n’a pas voulu avoir d’enfant avec moi, alors j’ai fait appel à un donneur ». Finalement, la plaignante ne va demander aucune somme d’argent.

Le Procureur se lève : « Certes, ils étaient dans l’indifférence réciproque, mais de là à dire qu’il ignorait la grossesse, je n’y crois pas. De plus, même s’il n’y a pas de témoin dans ce dossier, la plainte est précise, et le discours de la victime est constant. Nous avons un certificat médical à l’appui et des photos. Autre chose, madame a déposé plaine immédiatement après les faits, ce qui montre que cela n’était pas calculé de sa part. Ne voyez-vous pas qu’elle est complètement perdue ? »

Après avoir énuméré les circonstances aggravantes, « ils sont conjoints, madame est enceinte, et il a utilisé une arme par destination (le parapluie) », le Ministère public requiert six mois de prison dont cinq avec sursis.

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La défense sème le doute

« Mon client a tiré un trait sur sa vie privée pour la protéger, clame l’avocat du prévenu. Madame a demandé deux fois le divorce, sans jamais aller au bout de ses démarches. Oui, ils se disputent, mais comme tous les couples. Lorsqu’on lit ses déclarations, on voit bien qu’elle n’est pas en danger. »

Me Brezzo va attirer l’attention du tribunal sur un point : « Madame avait rendez-vous avec l’association d’aide aux victimes, elle ne s’y est pas présentée spontanément. On ne peut pas instrumentaliser le système judiciaire pour s’extirper d’une situation ! Et puis, non, elle n’est pas constante dans ses propos. Elle dit qu’elle était en arrêt de travail suite au choc, alors qu’elle a été arrêtée cinq jours plus tôt ». La défense demande la relaxe.

Pour faire la lumière sur ce soit-disant rendez-vous, le Président fait intervenir la bénévole qui a pris en charge la victime, le jour où elle s’est présentée dans les locaux de l’association rue de la Turbie. « Madame avait en effet rendez-vous pour des faits qui remontent au 24 décembre dernier, quand monsieur l’a coincée avec un matelas. »

Alors que le Procureur y voit une fatalité, le Tribunal semble douter pour prononcer, après délibération, une peine d’un mois de prison avec sursis. L’homme ne sera donc pas incarcéré si, dans un délai de cinq ans, il ne commet aucune nouvelle infraction.

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