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Interview

« Une passerelle vers l’imaginaire » : l’artiste Junior Fritz Jacquet expose L’Océan de Léa à Nice

L'océan de lea
Junior Fritz Jacquet, maître Origami, expose depuis 20 ans ses œuvres dans le monde entier © Junior Fritz Jacquet

L’artiste haïtien Junior Fritz Jacquet présente jusqu’au 14 septembre son exposition immersive « L’Océan de Léa » au Centre des Congrès OcéaNice. Une installation de 2000 m² entièrement réalisée en papier recyclé qui invite à la méditation et à la sensibilisation environnementale.

Junior Fritz Jacquet, 46 ans, artiste né en Haïti et installé à Paris, présente « L’Océan de Léa » au Centre des Congrès OcéaNice jusqu’au 14 septembre. Cette exposition immersive transforme 2000 mètres carrés en un environnement sous-marin entièrement conçu en papier. « C’est une exposition sans prétention, vraiment avec beaucoup d’humilité », explique l’artiste qui se définit comme maître en origami, titre accordé par la Nippon Origami Association pour avoir « apporté une évolution à cet art ancestral ».

L’exposition est née d’une « rencontre entre une ancienne patinoire désaffectée et un artiste un peu fou, passionné de papier », raconte Junior Fritz Jacquet. Le projet a pris forme pendant une résidence de quatre mois avec dix-sept collaborateurs, représentant « l’équivalent d’un an et demi de travail ». L’artiste découvrira seulement après deux mois de travail que 2025 était proclamée « année des océans ». Passionné de papier depuis l’âge de sept ans, Junior Fritz Jacquet a révolutionné l’origami traditionnel en développant sa propre technique. « L’origami, c’est plutôt des formes assez angulaires, pliées. J’ai commencé à essayer déjà de froisser le papier, de le défroisser, de le modeler et c’est ça qui m’a donné ma touche un peu singulière », explique-t-il.

Un chantier artistique colossal avec du papier recyclé

Derrière cette apparente légèreté se cache un chantier colossal. Pendant quatre mois, l’artiste et ses dix-sept collaborateurs ont travaillé « quasiment jour et nuit » pour donner vie à cette exposition. L’équivalent d’un an et demi de travail condensé en une résidence artistique intensive qui a mobilisé dix tonnes de papier sulfurisé récupéré « dans une usine qui fermait pour qu’elle ne parte pas à la poubelle », explique Junior Fritz Jacquet. Cette démarche s’inscrit pleinement dans l’engagement environnemental de l’artiste. « Le message est déjà engagé », souligne-t-il, précisant qu’il essaie de « sensibiliser sans mots, sans essayer de moraliser les gens ».

L’ingéniosité technique impressionne autant que la prouesse artistique. Chaque élément se replie sur lui-même, permettant de transporter cette installation monumentale dans l’équivalent de trois semi-remorques. « les pièces sont repliées à la fin de l’exposition », précise l’artiste. « Il faut à peu près 260 mètres carrés pour stocker l’exposition ». Cette conception modulaire a permis de faire voyager « L’Océan de Léa » du Grand Palais parisien à la résidence de l’ambassadeur de France à Washington, en passant par les escaliers d’honneur du Quai d’Orsay.

St Ouen 2025 © Manon Chemineau

Une approche centrée sur l’imaginaire

« J’ai pas voulu reproduire un fond marin, j’ai voulu en fait m’en inspirer pour permettre à toutes et à tous les visiteurs de laisser parler leur imagination », précise-t-il. L’installation se concentre sur deux animaux emblématiques : la raie manta et les méduses. « D’après mes recherches et mon observation personnelle, il s’agit des deux animaux marins qui étaient les plus tatoués sur la peau des gens », justifie l’artiste qui voit dans ces créatures « les deux animaux qui permettaient à n’importe qui de pouvoir se projeter dans nos profondeurs ».

Cette approche vise à créer « une passerelle vers l’imaginaire ». « Si un enfant voit les raies manta comme des papillons, je dirais c’est parfait, s’il les voit comme des dragons, je dirais, c’est très bien », explique Junior Fritz Jacquet, car « il n’y a pas de bonne ou de mauvaise réponse dans l’océan de Léa ». L’objectif est de permettre aux visiteurs de « rentrer, se l’approprier et s’asseoir et se laisser rêver ».

L’une des particularités de « L’Océan de Léa » réside dans sa capacité d’adaptation : « ma particularité c’est que c’est en fonction des lieux que je trouve les œuvres les plus adaptées », explique l’artiste qui compare son travail au concept de la tortue qui s’adapte à son environnement. L’exposition peut couvrir « entre 1000 mètres carrés jusqu’à 4000 mètres carrés. Si vous me donnez un grand espace, j’essaye de le remplir avec beaucoup de cohérence et si c’est un petit espace, je m’adapte », indique-t-il.

Avant Nice, « L’Océan de Léa » a été présentée au Grand Palais à Paris, à la résidence de l’ambassadeur de France à Washington et au Quai d’Orsay. La version niçoise représente « sa taille la plus grande », selon l’artiste et s’inscrit parfaitement dans le programme de l’Année de la Mer.

L'océan de lea
© Junior Fritz Jacquet

L’accueil du public dépasse toutes les attentes. « Les gens dansent dans l’exposition, ils m’envoient des photos spontanées », rapporte Junior Fritz Jacquet qui reçoit de nombreux messages sur Instagram. « Beaucoup de personnes âgées prennent vraiment le temps de m’écrire des vraies lettres, en me disant les émotions qu’ils ont ressenties, qu’ils étaient heureux d’y aller avec leurs petits-enfants ». Son message préféré : « Vous êtes un poète. Ne le niez plus. »

Cette reconnaissance valide l’approche de l’artiste qui souhaite toucher les visiteurs « dans leurs émotions ». « Si ça les touche, que ça leur parle et qu’ils arrivent à transposer ça sur notre planète et que ça arrive à générer des bienfaits, moi j’en suis très content », confie-t-il. L’exposition invite ainsi à « un petit temps d’arrêt, un petit moment suspendu où on se remet en question sur la fragilité de notre écosystème, sur la beauté de notre océan ».

Junior Fritz Jacquet voit dans cette réussite la possibilité d’« avoir ouvert la voie à d’autres paper artists » pour créer des « installations monumentales » en papier. En attendant ses prochains projets, notamment une installation sur le thème de la forêt qui nécessitera « un hangar qui fait plus de 1000 mètres carrés », l’artiste espère que cette « plongée sans se mouiller, sans palmes et sans combinaison » sensibilisera le public à la beauté et à la fragilité de nos océans.

Antoine Pouponnot – Pilote de drone certifié

Informations pratiques

  • Adresse : Centre des Congrès OcéaNice, Port de Nice
  • Dates : du 12 juillet au 14 septembre 2025
  • Horaires : du dimanche au vendredi de 10h à 18h et les samedis de 10h à 20h 
  • Tarifs : 10 euros (tarif réduit 5 euros pour les enfants de 5 à 14 ans – gratuit pour les moins de 5 ans)