Le Prince Albert II reçoit le président portugais Marcelo Rebelo de Sousa pour une visite historique
La visite du président Marcelo Rebelo de Sousa marque l’entrée en vigueur d’une coopération renforcée entre les deux États, plus d’un siècle après les liens tissés par deux souverains océanographes.
Sous le ciel bleu matinal, les Carabiniers du Prince se tenaient immobiles dans la Cour d’Honneur du Palais Princier ce vendredi. Malgré la fraîcheur de novembre, l’atmosphère était à la célébration pour accueillir Marcelo Rebelo de Sousa, président de la République portugaise, venu accomplir une première historique avec sa délégation : jamais un chef d’État portugais n’avait effectué de visite officielle dans la Principauté.
À 10h15 précises, le Prince Albert II et la Princesse Charlène ont reçu leur hôte au pied des marches du Palais. Les hymnes nationaux ont résonné sous les ordres du Colonel Tony Varo, commandant supérieur de la Force publique, avant la revue du détachement militaire par les deux chefs d’État. Cette rencontre au sommet, préparée depuis la signature en 2007 de l’établissement des relations diplomatiques, concrétise dix-huit années d’approfondissement des liens bilatéraux. « Pour la communauté portugaise, c’est une fierté immense que le président se déplace ici à Monaco. Sa visite montre que notre présence est véritablement reconnue », témoigne Pedro, jeune portugais de 25 ans, habitant de Beausoleil.



Échanges de décorations et signature d’un accord-cadre
La journée a été rythmée par plusieurs temps forts. Après l’audience bilatérale au Salon de Famille, les deux souverains ont procédé à l’échange de décorations dans le Salon des Glaces. Le Prince Albert II a élevé Marcelo Rebelo de Sousa à la dignité de Grand-Croix dans l’ordre de Saint-Charles, tandis que le président portugais a remis au couple princier le Grand Collier et la Grand-Croix de l’Ordre du Christ. Ces distinctions, loin d’être anecdotiques, matérialisent la reconnaissance mutuelle entre deux États qui partagent leur attachement à la préservation des océans.
Le déjeuner officiel a précédé la signature d’un accord-cadre de coopération, négocié depuis 2018. Ce texte, paraphé en présence d’Isabelle Berro-Amadéï, conseiller de Gouvernement-Ministre des Relations Extérieures, et d’Inês Domingos, secrétaire d’État portugaise aux Affaires européennes, structure les échanges dans des domaines aussi variés que la culture, l’éducation ou la préservation marine.
Un hommage aux pionniers de l’océanographie
L’après-midi a transporté les délégations vers les jardins Saint-Martin, où une exposition photographique intitulée « Souverain océanographe » jalonne les grilles. Vingt-trois clichés retracent l’héritage scientifique d’Albert Ier, présentés alternativement par Thomas Fouilleron, directeur du Service des archives et de la bibliothèque du Palais, et Vincent Vatrican, directeur de l’Institut audiovisuel de Monaco.
Au coeur des jardins, un buste de Dom Carlos a été dévoilé sous les yeux du président et de la délégation portugaise. Des élèves du lycée Albert Ier ont ensuite lu un dialogue entre le roi portugais et le prince monégasque, évoquant leur collaboration scientifique. Un geste symbolique qui a précédé le dépôt de gerbes au pied de la statue d’Albert Ier, scellant dans le bronze et le marbre une amitié centenaire. « Ma visite dans votre pays en 2022, à l’occasion de la commémoration du centenaire du Prince Albert Ier, demeure un souvenir profondément marquant, tant votre hospitalité y fut exceptionnelle », a déclaré dans un discours le Prince Albert II.
L’héritage des souverains océanographes
« Même si j’ai quitté Monaco il y a plusieurs années, la visite du président portugais reste un événement que je regarde avec attention. J’y ai grandi, et je sais qu’il existe une amitié historique entre Monaco et le Portugal, notamment à travers les liens scientifiques et diplomatiques développés par le passé », nous confie Luis, habitant de Porto ayant vécu à Beausoleil jusqu’à ses 18 ans.
Au-delà du cérémonial, cette visite revêt une dimension symbolique forte. En témoignent l’émotion et le soutien exprimés par le Prince Albert au Président Rebelo de Sousa lors des incendies en août dernier. Cette amitié s’inscrit effectivement dans une histoire commune tissée dès la fin du XIXe siècle, quand les relations consulaires furent établies en 1871. Mais c’est surtout la passion océanographique partagée par le Prince Albert Ier et le Roi Dom Carlos Ier qui constitue le socle de cette relation entre les deux nations. Tous deux scientifiques et navigateurs, ils nouèrent au tournant du XXe siècle des liens qui dépassèrent largement le cadre diplomatique.
La visite s’est achevée au Musée océanographique, institution fondée par Albert Ier en 1910. Robert Calcagno, directeur général de l’Institut océanographique, a guidé les deux chefs d’État à travers l’exposition « Méditerranée 2050 », un parcours immersif sur l’avenir de cette mer fragile. « Votre présence est l’occasion de rappeler que ce qui lie éminemment Monaco et le Portugal, aujourd’hui encore, est l’Océan. Un espace vivant, fragile et essentiel, qui façonne nos identités, inspire nos économies et guide nos engagements internationaux », a rappelé le Souverain monégasque. La signature d’un protocole d’accord entre l’Académie de la Mer et l’Atlantic Center portugais a conclu cette journée placée sous le signe de la science et de la diplomatie.
Une communauté portugaise bien implantée
« Voir le représentant suprême de notre pays d’origine venir dans le pays qui nous fait vivre est une sorte d’alliance symbolique et une reconnaissance qui démontre que la communauté portugaise a su, par la force du travail, poser son empreinte et devenir parti-prenante de la vie monégasque », nous glisse Micka cet autre jeune portugais de 26 ans.
En 2024, la communauté portugaise représente une présence significative à Monaco avec 418 résidents et près de 4 300 salariés, dont la plupart font quotidiennement le trajet depuis la France voisine. Des chiffres qui témoignent d’une relation qui dépasse largement le cadre institutionnel pour s’ancrer dans le tissu social et économique de la Principauté.













