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Interview

Rupa Dash, PDG de World Woman Foundation : « Remplaçons l’égalité par l’harmonie »

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L'événement s'est tenu les 17 et 18 juin à l'hôtel Splendide de Cannes © WORLD WOMAN FOUNDATION

En marge du Cannes Lions Festival of Creativity, la World Woman Foundation a organisé un événement à l’hôtel Splendid sur le thème : Power of Women in the Creativity Economy.

L’industrie créative génère 2 250 milliards de dollars par an. Pourtant, les femmes restent sous-représentées aux postes de direction. Cette réalité doit changer. Dirigée par Rupa Dash, la World Woman Foundation milite pour une nouvelle approche. Investir dans le leadership féminin n’est plus seulement une question d’équité. C’est devenu une stratégie d’innovation et de croissance.

L’événement a réuni des profils variés : des dirigeants, des diplomates comme l’Ambassadeur d’Indonésie H.E. Swajaya, des jeunes talents comme Aayati Dash Kar. L’objectif est d’amorcer un nouveau mouvement créatif fondé sur l’inclusion avec une portée mondial. La World Woman Foundation accompagne un million de femmes d’ici 2030 grâce à des programmes de mentorat. L’organisation crée des expériences dans le business, le divertissement, la technologie et l’entrepreneuriat social.

Rupa Dash, un parcours d’une visionnaire

Rupa Dash n’est pas arrivée par hasard à la tête de cette organisation mondiale. Son histoire personnelle illustre les défis que rencontrent les femmes entrepreneuses. Arrivée aux États-Unis en 2012, elle découvre rapidement les barrières invisibles du monde professionnel américain. « Même si vous êtes la femme la plus qualifiée dans la pièce, le statut d’immigrant ne joue pas toujours en votre faveur », confie-t-elle. « Plutôt que d’attendre que quelqu’un me donne une opportunité, j’ai créé ma propre opportunité, car je crois fermement que si vous avez besoin de quelque chose, vous devez le créer. Vous devez vous lancer vous-même ». Cette philosophie de l’auto-détermination est devenue le socle de la World Woman Foundation.

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© World Woman Foundation

En quelques mots, quelle est la mission de la fondation aujourd’hui ?

Rupa Dash : Nous appelons notre mission « Equality Moonshot Mission ». Nous ne sommes pas comme un pays qui tente d’envoyer une femme sur la lune, mais nous essayons d’offrir l’égalité aux femmes sur Terre, ce qui signifie leur donner un accès égal au capital, qui est la chose la plus importante. Sans capital, vous ne pouvez rien faire. Notre mission est donc d’investir dans un million de femmes d’ici 2030. Pour ce faire, nous leur donnons accès au capital. Nous leur offrons des possibilités de coaching. Nous disposons également d’un studio de création où les femmes peuvent venir créer du contenu et réfléchir à la manière de réécrire leur propre histoire, comme si elles en étaient les héroïnes. Nous construisons également des communautés à travers le monde. Nous sommes aujourd’hui une communauté de 55 000 femmes à travers le monde, appelée Women Global et nous représentons plus de 60 nationalités, ce qui est considérable.

Si vous pouviez imaginer un monde plus égalitaire pour les femmes, à quoi ressemblerait-il ?

Rupa Dash : L’égalité est très difficile à atteindre. C’est toujours un combat. Le mot « égalité » lui-même nous oppose les uns aux autres. Je préfère remplacer ce mot par « harmonie ». Il est possible de coexister en harmonie. Toutes les situations ne nécessitent pas l’égalité. Si vous allez dans l’endroit le plus sauvage de la Terre et que vous observez les animaux, la façon dont ils coexistent, ce n’est jamais égalitaire. Je pense que le monde doit repenser la question de l’égalité des sexes pour aller vers l’harmonie entre les sexes. Réfléchir à de nouvelles façons de créer des systèmes, des solutions plus harmonieuses pour l’avenir. 

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© World Woman Foundation

L’exemple de l’Indonésie

L’ambassadeur d’Indonésie Ngurah Swajaya a apporté sa vision lors de l’événement. En discours d’ouverture, Ngurah Swajaya a expliqué notamment comment l’Indonésie tire parti de son capital culturel pour redéfinir l’économie créative à l’échelle mondiale, en donnant la priorité à l’innovation, à l’inclusion.

Son intervention illustre comment la diplomatie peut servir la cause de l’égalité des genres : « L’Indonésie, la nation à la plus forte population musulmane au monde, a été l’un des premiers pays d’Asie à élire une femme présidente. Et nous avons également, pour deux mandats consécutifs, une femme à la tête du Parlement. Je pense que les femmes jouent un rôle important dans l’histoire, dans le développement et dans toutes les activités, y compris dans le sport. Le seul problème est toujours le défi classique auquel nous sommes confrontés. Lorsque nous parlons de créativité, d’économie numérique, il s’agit toujours d’alphabétisation, de la manière de permettre aux femmes d’avoir un accès réel à l’éducation numérique, à l’économie numérique, à l’accès au financement », explique le diplomate. « Le rôle des femmes est essentiel pour maintenir la paix et la stabilité ».

Les chiffres confirment cette dynamique. Aujourd’hui, 32% des députés indonésiens sont des femmes. C’est plus que le quota légal de 30%. L’ambassadeur ne se contente pas de constats. À Singapour, il organise chaque année un événement dédié aux femmes influentes : « Le gouvernement est en train d’adopter une loi qui stipule qu’au minimum 30 % des membres du Parlement doivent être des femmes. Je pense que c’est une réussite et nous essayons non seulement d’introduire cela au niveau national, mais aussi dans la région. En tant qu’ambassadeur à Singapour, j’organise chaque année une manifestation pour présenter des femmes très influentes et très brillantes dans tous les domaines, afin que les filles et les femmes puissent s’inspirer entre elles ». L’objectif est d’« inspirer également les jeunes générations ». Sa conviction est claire : « Quand les femmes sont impliquées, les résultats sont incroyablement fructueux ». Cette approche trouve un écho dans la vision de Rupa Dash. Les deux leaders partagent une même conviction : le changement passe par l’action concrète et la collaboration internationale.

Comment voyez-vous le rôle de la diplomatie dans votre mission ?

Rupa Dash : Les entreprises doivent choisir des femmes créatives pour leurs campagnes et projets. Ensemble, nous réécrivons les règles de l’influence. Nous construisons un avenir plus équitable. Quand nous travaillons avec des ambassadeurs comme H.E. Swajaya, nous créons des ponts entre les pays. L’exemple indonésien montre qu’il est possible d’avancer. En tant qu’organisation mondiale, nous accélérons l’harmonie des genres. C’est notre façon d’aider les Objectifs de développement durable des Nations Unies.

L’approche de la World Woman Foundation se distingue par sa dimension globale et son pragmatisme. Rupa Dash a compris que le changement ne viendra pas des discours mais de l’action. Son organisation investit concrètement dans les femmes. Capital, formation, réseau : tous les outils sont réunis. L’ambassadeur indonésien partage cette vision pragmatique. Son pays montre qu’il est possible d’allier tradition et progrès. L’Indonésie prouve que les quotas peuvent fonctionner. Mais surtout, que la volonté politique peut changer les choses. Ensemble, ces deux leaders souhaitent dessiner une nouvelle approche. L’égalité ne se décrète pas, elle se construit.

D’ici 2030, la World Woman Foundation compte accompagner un million de femmes, afin de prouver qu’un autre modèle est possible. Un modèle où l’industrie créative de 2 250 milliards de dollars exploite enfin tous ses talents.