Samuel Vuelta Simon dévoile sa feuille de route pour la justice monégasque
Un an après son entrée en fonction, le secrétaire d’État à la justice, Samuel Vuelta Simon a dressé devant la presse le bilan des réformes engagées. Avec une équipe d’à peine trente collaborateurs, la Direction des Services Judiciaires mène un travail ambitieux pour hisser l’administration judiciaire monégasque au niveau des standards internationaux.
« La justice ne doit pas s’exercer dans l’ombre », a affirmé Samuel Vuelta Simon lors de sa première conférence de presse. Cette volonté intervient au lendemain d’une audience solennelle de rentrée dont il s’est dit « très fier ». L’ancien magistrat français, fort de plus de 30 ans d’expérience, a d’emblée clarifié son rôle face aux critiques récurrentes sur l’indépendance de la justice : « En un an, je n’ai jamais donné d’instruction individuelle dans une affaire. Ce n’est pas mon travail. » Il rappelle que la Constitution monégasque prévoit une délégation totale du pouvoir judiciaire aux cours et tribunaux, et que seul le Souverain peut lui demander des comptes : « Administrer la justice, c’est faire en sorte que les magistrats, les juges, les procureurs, les greffiers travaillent sereinement, en toute indépendance », a-t-il martelé.
La rentrée 2025 constitue une première avec l’arrivée de sept nouveaux magistrats au 1er septembre. Au-delà des cinq remplacements, la France a accordé deux postes supplémentaires pour créer un pôle des affaires économiques et financières au parquet général, portant l’effectif total à 17 magistrats : « La France a accepté sans difficulté malgré sa continuité budgétaire et les restrictions sur les emplois judiciaires », s’est félicité le Secrétaire d’État.
Face aux trois postes vacants au tribunal de première instance et à l’augmentation des contentieux, une solution innovante devait être votée jeudi soir : la création d’une réserve judiciaire. Cette structure, inspirée du modèle français qu’il a contribué à mettre en place, réunira une quinzaine de magistrats retraités (Monégasques ou Français) qui viendront épauler les titulaires. « Ce sont des magistrats expérimentés, voire très expérimentés : un chef de cour d’appel, tous les profils, spécialisés en pénal, civil ou matière financière », précise-t-il.
Signal d’espoir : onze personnes se sont inscrites aux préparations des concours, une première après l’annulation d’un concours l’an dernier faute de candidats. Cinq d’entre elles visent la magistrature, dont trois exclusivement : « C’est une petite flamme qu’on entretient. C’est une bonne nouvelle parce que ça veut dire que la justice commence à avoir une image plutôt positive. Je souhaiterais qu’au moins la moitié des magistrats qui servent à Monaco soient des nationaux », confie Samuel Vuelta Simon. L’Institut Monégasque de Formation aux Professions Judiciaires, créé il y a deux ans avec seulement deux personnes, porte ses fruits : 700 places de formation offertes cette année sur la lutte contre le blanchiment, contre 600 en 2024 et 140 en 2023.

Modernisation législative
Plusieurs projets de loi structurants sont en préparation : introduction de la comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC) et de la convention judiciaire d’intérêt public, techniques permettant des sanctions rapides dans les affaires financières sans surcharger les juges d’instruction. Le renforcement des pouvoirs du procureur général dans les enquêtes préliminaires et la modernisation des statuts professionnels (avocats, notaires dont le statut date de 1886, huissiers) figurent aussi à l’agenda.
L’enjeu international reste prioritaire. « Il n’y a pas une affaire judiciaire qui ne soit internationale à Monaco. Il y a toujours une dimension internationale et au pénal plus qu’ailleurs, donc, on doit absolument développer l’action internationale de la justice monégasque ». Des traités bilatéraux d’entraide judiciaire sont en négociation avec la Chine, Abu Dhabi, le Panama et le Brésil, après des « réponses positives » de ces pays qui exigeaient auparavant de tels accords pour toute coopération.

Autre annonce importante : Monaco présidera le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, une « chance inouïe » qui a lieu généralement tous les 20 ans. « C’est l’occasion de prouver que notre évolution nous a amenés au niveau des autres grands États », insiste-t-il. Concernant le GAFI, l’optimisme est de mise : en décembre 2024, Moneval a reconnu la conformité de Monaco aux standards de lutte contre le blanchiment : « On est sur une pente ascendante en termes de conformité aux standards internationaux. . Ce n’est pas un sprint mais une course de fond », prévient-il, évoquant la nécessité de changer durablement la « culture judiciaire » monégasque.













