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Interview

Le trio Zeliha : une ode à la jeunesse qui charme les plus grands

Le trio Zeliha
Christophe Grémiot

Le trio Zeliha charme pour son authenticité, à la ville comme à la scène. Nous avons rencontré les trois musiciens lors de leur récital à l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo. S’ils se disent chanceux, les grands noms de la musique classique n’ont aucun doute de leur mérite. Portrait.

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« L’histoire du lac Zeliha concordait avec nos âmes, avec notre manière de jouer, avec notre amour et passion pour la musique » sourit Manon Galy, violoniste du trio. Car avant d’être le nom d’un trio, Zeliha est le nom d’un lac sacré en Turquie qui serait né des larmes d’une princesse pleurant la mort de son prince.

Le trio Zeliha, c’est avant tout trois amis en diplôme d’artiste interprète au Conservatoire National de Paris : Manon Galy (24 ans), violoniste, Maxime Quennesson (25 ans), violoncelliste, et Jorge González Buajasan (26 ans), pianiste. Leur complicité se traduit en une musique intime qui surmonte la grande difficulté du trio : le risque que chaque musicien joue dans son coin, sans une vision commune. 

« On a des avis différents sur les choses, mais on apprend à évoluer ensemble » précise Manon Galy, avant que Maxime Quennesson n’ajoute : « Jouer en trio nous confronte à nos propres opinions. Il y a des choses auxquelles en tant que cordes on ne prête pas attention, alors que le piano a une vision beaucoup plus harmonique. »

Trio Zeliha, Manon Galy, Maxime Quenesson , Jorge González Buajasan
 © Dimitri Scapolan

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Un CD chez Mirare

Quelques jours avant leur concert à Monte-Carlo, le trio Zeliha a sorti son premier CD – « un coup de bol énorme » selon Maxime Quennesson. Quand le trio parle du CD, c’est tout d’abord un sentiment d’incrédulité qui ressort. « C’est quand même assez rare. Cela faisait moins d’un an qu’on jouait, et voilà qu’on nous propose de faire un CD. On n’avait aucun répertoire vraiment assis. »

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Le répertoire du CD est un mélange d’époques et de morceaux plus ou moins connus. Mendelssohn, Arentsky (« une pièce magnifique mais moins défendue »), Shostakovitch. Le disque est aussi une ode à la jeunesse, à la leur, une ode involontaire qui ressort dans l’entrain de leur jeu, et à celle des compositeurs. « Chaque œuvre est le premier trio de chaque compositeur, donc il y a quelque chose qui s’apparente à la jeunesse aussi » explique Maxime Quenesson.

Cela fait chaud au cœur d’entendre un groupe si jeune, de voir une telle profondeur musicale

Menahem Pressler

Le CD a notamment reçu les éloges du pianiste Menahem Pressler qui félicite « l’exquise musicalité » et « les qualités techniques » du trio. « Cela fait chaud au cœur d’entendre un groupe si jeune, de voir une telle profondeur musicale. »

Leur premier concert à Monaco

À Monaco, le trio joue du Beethoven : « L’Archiduc » et le « Trio des esprits ». Le concert à l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo est leur seul concert maintenu au mois de novembre. En période de pandémie, la Principauté est une exception en Europe : malgré le Covid-19, à Monaco, la culture n’a jamais dû baisser le rideau

Attendant le retour sur scène avec impatience, le trio admet que la pandémie a changé la relation au public. « C’est quand même triste de jouer dans une salle avec une cinquantaine de personnes disséminées » regrette Jorge González Buajasan. Un constat partagé par Manon Galy. « Jouer devant un public masqué et de ne pas voir les émotions, cela fait bizarre. Un concert devrait être un moment de partage et de bien-être, et les gens sont inconfortables, éloignés. »

Ce n’est pas seulement de prendre des jeunes, mais de prendre des jeunes valables

Didier de Cottignies, délégué artistique de l’Orchestre Phliarmonique de Monte-Carlo

Le trio Zeliha a été invité à Monaco par Didier de Cottignies, délégué artistique de l’Orchestre Philharmonique de Monte-Carlo. La même incrédulité du CD revient. « Il nous a fait confiance » souffle Jorge González Buajasan. Mais pour Didier de Cottignies, qui a été délégué artistique de l’Orchestre National de France et conseiller musical de Stanley Kubrik, il n’y a pas de hasard. « Je sais qu’ils ne vont pas me faire du bâclé. Ils travaillent comme travaillaient Cortot, Thibaut e Casals quand ils préparaient un trio*. Il y a un approfondissement de l’œuvre. » Il y a-t-il aussi une volonté de rajeunir la scène musicale monégasque ? « Oui, enfin, pas seulement. Ce n’est pas seulement de prendre des jeunes, mais de prendre des jeunes valables. »

*L’un des plus grands trios du XXème siècle.

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