Publicité »
Portrait

Isabella Vieira : l’Amazonie à Monaco, quand la sagesse ancestrale rencontre le luxe

Isabella Vieira
Isabella Vieira / Photo via Instagram giu_monte_carlo_

À Monaco, la thérapeute holistique et cinéaste brésilienne Isabella Vieira incarne un pont rare entre deux mondes : celui de la sagesse chamanique amazonienne et celui des athlètes de haut niveau et des dirigeants en quête d’équilibre. Portrait d’une femme qui porte en elle la voix de la forêt.

Dans l’effervescence discrète de la Principauté, où le luxe se mesure souvent en mètres carrés et en zéros sur un compte bancaire, Isabella Vieira détonne. Pas par ostentation – au contraire. Mais par cette présence paisible, presque énigmatique, que plusieurs de ses clients décrivent comme « une énergie qui apaise dès qu’on la rencontre ». Installée à Monaco depuis quatre ans, cette Brésilienne de 47 ans a choisi la Principauté non par appétit pour le prestige, mais par simple pragmatisme : « La plupart de mes athlètes, de mes clients, sont basés ici », explique-t-elle avec une franchise désarmante.

Avant Monaco, il y avait Calvi, en Corse, où elle recevait ces sportifs de haut niveau venus chercher auprès d’elle une forme de ressourcement que les protocoles médicaux conventionnels ne pouvaient offrir. Avant la Corse, Paris, où elle a commencé à travailler avec des footballeurs du PSG dès 2011. « Je n’ai jamais signé avec aucun club », précise-t-elle, « mais j’avais une technique différente pour la récupération énergétique et musculaire. On travaillait en profondeur, pour aider l’athlète à récupérer son énergie beaucoup plus vite. »

Une lignée chamanique transmise de génération en génération

Ce qui distingue Isabella Vieira des innombrables thérapeutes du bien-être, c’est l’origine de son savoir. Elle ne l’a pas appris dans une école occidentale de naturopathie, mais hérité. « Je viens d’une famille où j’ai une lignée du côté de mon père, qui vient de la forêt amazonienne. Mes ancêtres venaient d’une lignée chamanique », confie-t-elle. Son arrière-grand-mère était l’une des premières femmes chamanes du peuple Huni Kuin. Son père, naturopathe et « très grand guérisseur », lui a transmis cette sagesse ancestrale dès l’enfance.

Tout ce qu’on vit ici, dans le monde physique et terrestre, n’est qu’une partie de la vie que nous avons

« Il faut choisir un enfant qui est plus sensible », explique-t-elle. « Il y a une transmission qui est déjà faite génétiquement, et après toute une transmission de sagesse ancestrale qui est véhiculée à l’enfant. » Isabella est ainsi la première de sa lignée à partir à l’étranger, portant avec elle un héritage millénaire qu’elle adapte aux besoins d’une clientèle moderne, occidentale, souvent sceptique.

Car l’enfance d’Isabella n’a pas été une promenade sereine vers l’illumination. « Je n’ai pas eu cet équilibre depuis toujours », admet-elle. « J’ai eu une enfance assez difficile pour comprendre. Quand on a une certaine sensibilité médiumnique, ce n’était pas toujours évident de trouver sa place. On se sent différent. » À six ans, elle a vécu sa première expérience de dédoublement : voir son âme se détacher de son corps pendant le sommeil, observer son enveloppe charnelle depuis l’extérieur. « C’est comme si j’ai toujours su que tout ce qu’on vit ici, dans le monde physique et terrestre, n’est qu’une partie de la vie que nous avons. »

Du PSG à Monaco : une approche holistique qui séduit l’élite

Sa méthode ? Une approche qu’elle résume ainsi : « Connaissance de soi et expansion de conscience. » Pour Isabella, le corps physique n’est que « le miroir de tout ce qui se passe dans notre tête, dans nos pensées, dans nos émotions ». Sa prescription est d’une simplicité désarmante : respirer. « Prendre le temps de respirer, même quelques minutes par jour. Un moment de calme pour tout couper. » Elle raconte avec amusement qu’une de ses athlètes lui a confié : « Je ne vais pas trop prendre le temps de respirer avant le match parce que ça me détend trop ! »

Avant, le bien-être à Monaco, c’était surtout des massages

Cette approche, qui marie techniques de respiration, méditation et sagesse amazonienne, trouve un écho particulier à Monaco. « Depuis le Covid, j’ai pu voir qu’il y a eu beaucoup de personnes qui se sont penchées plus vers la méditation, plus vers le manger sain », observe-t-elle. « Avant, le bien-être à Monaco, c’était surtout des massages, de l’esthétique. Je suis très contente de voir que ça évolue vers une dimension plus holistique. »

Nawa Sia : donner une voix aux gardiens de la forêt

Mais Isabella Vieira n’est pas qu’une thérapeute. Elle est aussi cinéaste, et son documentaire Nawa Sia – The Secrets of Amazonia – dont le nom signifie « Étoile de Vérité » en langue Huni Kuin – a connu sa première mondiale à l’Opéra de Monte-Carlo en avril dernier. Soutenu par la Fondation Prince Albert II, le film explore le lien profond entre les peuples autochtones et la forêt amazonienne.

« Je voulais surtout donner une voix aux peuples autochtones », explique-t-elle avec passion. « Faire voir qu’il y a cette sagesse ancestrale qui est là et bien vivante. Souvent, quand on parle des peuples autochtones, on les retrouve dans l’histoire, dans les bouquins, comme si c’était quelque chose qui a existé. Mais c’est quelque chose qui est bien réel. »

Il n’existe pas de crise climatique, il y a une crise de l’être humain

Le message du film résonne d’une urgence particulière à l’heure des crises climatiques. Pour Isabella, « il n’existe pas de crise climatique, il y a une crise de l’être humain ». Et c’est précisément là que les peuples autochtones ont des réponses à offrir – même si elle observe avec lucidité la pression croissante qui pèse sur eux : « Dans les tables de discussion, ils veulent utiliser la sagesse des peuples autochtones pour donner des réponses à toute cette crise. On compte sur vous pour avoir des réponses pour le futur. »

Le 19 avril dernier, l’Opéra de Monte-Carlo s’est métamorphosé en portail vers l’Amazonie © Aude Hurstel – APG Signature

Le respect à 360 degrés

Son prochain projet ? Construire l’Université de la Forêt et écrire un livre avec sept gardiens autochtones des quatre coins du monde sur les « codes sacrés de la Terre ». Le tout basé sur un concept qu’elle nomme « respect à 360 degrés ». « Le respect, c’est le seul sentiment qui n’a pas de négatif », affirme-t-elle. « Même l’amour, quand il y en a trop, peut se transformer en possession, en égoïsme. Mais le respect… quand on a le respect envers tout ce qui est visible et invisible, envers nos ancêtres, envers les futures générations, je n’arrive pas à voir un point négatif. »

Sa philosophie de vie ? « Tout est sacré. Quand on prend conscience que tout est sacré, on vit beaucoup mieux. » Un principe qu’elle applique même à Monaco, cité urbaine par excellence, où elle rappelle qu’on peut « renouer avec la nature » simplement « en prenant conscience qu’on boit un verre d’eau ».

Dans une Principauté où le luxe s’affiche, Isabella Vieira propose un luxe d’un autre ordre : celui de la connexion à soi, aux autres, à la Terre. Un luxe accessible à tous, pourvu qu’on accepte de respirer, d’écouter, de respecter. Et peut-être, au passage, d’entendre ce murmure ancestral qui vient de la forêt, porté par cette femme discrète qui a fait de Monaco son port d’attache pour mieux rayonner vers le monde.