Interview

Saint-Jean-Cap-Ferrat : 120 ans entre tradition, modernité et authenticité

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© OTMNCA

La presqu’île en forme de Y n’attire pas que les ultra-riches. Elle jouit d’un incroyable dynamisme culturelle et économique.

Territoire connu pour être le plus cher de France, la presqu’île souffre d’une image d’un territoire inaccessible alors qu’en réalité la commune dispose de nombreuses activités tout au long de l’année en plus de disposer d’une authenticité rare sur la Côte d’Azur. Entretien avec le maire de Saint-Jean-Cap-Ferrat, Jean-François Dieterich, à l’occasion des 120 ans de la commune.

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Pour commencer, pouvez-vous nous raconter brièvement l’histoire de Saint-Jean-Cap-Ferrat et sa création en tant que commune indépendante ?

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Jean-François Dieterich est le maire de la ville depuis 2014 © Jean-François Dieterich

La commune a vu le jour officiellement en 1904, après une séparation administrative avec Villefranche-sur-Mer autorisée par un arrêté présidentiel. Elle a suivi l’exemple de Beaulieu-sur-Mer qui avait fait la même chose en 1891.

Pour s’affranchir de Villefranche, le hameau de Saint-Jean devait démontrer une certaine distance géographique et une autosuffisance financière. C’est à partir de la fin du 19e siècle que la presqu’île connaît une riche fréquentation et commence à attirer des personnalités comme Léopold II, roi des Belges, dès 1895 et Béatrice Ephrussi de Rothschild et sa villa, qui ont contribué à son essor patrimonial et touristique. A l’origine le cap était un caillou, il n’y avait pas d’eau. Le couvert végétal a entièrement été créé par l’homme à partir de la fin du 19e siècle.

La commune s’appelait au départ Saint-Jean-sur-Mer puis a pris le nom de Saint-Jean-Cap-Ferrat en 1907. La presqu’île a toujours connu un essor sauf lorsque la population entière a été évacuée et la commune minée quand le régime nazi a occupé la zone libre.

Qu’est-ce qui différencie Saint-Jean-Cap-Ferrat des autres villes de la Côte d’Azur ?

La spécificité de notre commune réside dans son équilibre subtil entre tradition et modernité. C’est un village qui a su conserver son authenticité, avec une histoire séculaire marquée par la pêche et des patrimoines uniques comme la chapelle Saint-Hospice ou des villas emblématiques.

On a une vie de village particulièrement aboutie et abondante à Saint-Jean. Les gens ont plaisir à se retrouver autour d’événements folkloriques et traditionnels. Contrairement à des destinations comme Saint-Tropez, plus ouvertes à la fête, nous avons une clientèle qui recherche davantage d’intimité et d’authenticité.

Saint-Jean-Cap-Ferrat est connu pour être un territoire prisé par une clientèle internationale fortunée. Est-ce une réputation dont vous êtes fier ?

Ce n’est pas l’image que je cultive nécessairement. La présence de résidents fortunés contribue à l’économie locale en générant des emplois et en soutenant l’économie. Je tiens à ce que la commune reste accessible et accueillante pour tous. Saint-Jean, c’est un village authentique avec une population attachée à son histoire et à ses traditions.

Avec une majorité de résidences secondaires, comment parvenez-vous à dynamiser la commune toute l’année ?

C’est un défi que nous relevons avec une politique événementielle dense, allant des festivités locales comme la fête de la citrouille ou les événements culturels, à des projets environnementaux novateurs tout au long de l’année. Notre objectif est de maintenir une vie locale active, avec des familles vivant sur place et des écoles en activité.

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En août, La Grande Nuit Vénitienne propose aux touristes un voyage enchanteur © Saint-Jean-Cap-Ferrat

Cela passe aussi par des projets de logements accessibles pour maintenir nos familles ici. Je ne veux pas d’un village dortoir. La commune a une vocation culturelle qui permet d’avoir une fréquentation qualitative de la commune et de faire travailler les commerces. 

Quels sont les grands projets en cours ou à venir pour la commune ?

L’un de nos projets phares concerne l’aménagement d’une carrière de 27 000 m² que nous venons d’acquérir et qui a servi à la construction du port de Monaco. Nous allons y développer des projets environnementaux, agricoles et apicoles et peut-être même proposer de l’huile d’olive de Saint-Jean-Cap-Ferrat.

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Avant l’huile d’olive, la ville propose déjà son eau de fleur d’oranger 100 % locale © Saint-Jean-Cap-Ferrat

Nous avons rénové également le port et réfléchissons à un nouveau club nautique autour duquel s’articulerait un nouveau parking de 200 places, sous celui qui existe sur la plage, tout en maintenant nos efforts pour maintenir les commerces ouverts. Il n’y a quasiment plus un local commercial vide à Saint-Jean, c’est une grosse satisfaction. 

Comment garantissez-vous un développement respectueux de l’environnement dans un contexte de forte attractivité touristique ?

Nous avons adopté des mesures strictes pour limiter l’urbanisation, notamment via le Plan Local d’Urbanisme de la Métropole Nice Côte d’Azur, le respect de la loi Littoral et les espaces classés. La proximité de monuments historiques bloque un certain nombre de possibilités de construction. Tout cela permet de juguler et de favoriser les constructions en harmonie avec l’environnement. La capacité d’accueil est ce qu’elle est et permet d’éviter le tourisme de masse.

Par ailleurs, nous investissons dans des éclairages publics LED économes en énergie qui s’éteignent automatiquement à minuit et des plantations adaptées au climat pour minimiser la consommation d’eau. Nous voulons également développer des parcours santé qui mettent en avant le tourisme durable et la pratique du sport.

Quel rôle joue Monaco dans le développement et les partenariats de Saint-Jean-Cap-Ferrat ?

Nous collaborons régulièrement. Mon Seigneur est très investi dans la préservation de l’environnement, soutient certaines de nos initiatives et est souvent venu pour inaugurer le quai mais aussi des expositions comme celle cartophile et philatélique où l’on a retrouvé© des photos de Ses ancêtres. Le Prince Albert et son épouse sont venus vivre ici après la naissance des jumeaux.

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Le Prince Albert II et le maire lors de l’inauguration du quai Dunan © BBOstudio / Thierry B. Ouvrard

Je souhaiterais aussi développer une certaine synergie avec le Yacht Club de Monaco.

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Le Prince Albert II à l’inauguration de l’exposition cartophile et philatélique © Michael Alesi / Palais princier

Pour conclure, quelle vision avez-vous pour l’avenir de la commune ?

Ma priorité est de préserver l’authenticité et la qualité de vie qui font la renommée de Saint-Jean-Cap-Ferrat. Nous continuerons à développer des projets respectueux de l’environnement sur terre et en mer. Il faut aussi de la sécurité, de la tranquillité et de la beauté. C’est un équilibre permanent à tenir sur lequel il ne faut absolument pas déroger.